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UN COMMUNISME CAPITALISTE ? 

LE TRAVAIL AU VIET NAM, ENTRE HERITAGE ET MODERNITE

Viet Nam

Depuis notre arrivée, nous constatons que le Viet Nam revendique son communisme politique: le drapeau rouge estampillé d’une étoile dorée ainsi que le marteau et faucille sont omniprésents, le style des bâtiments institutionnels et des écoles ne laisse pas de doute sur les liens que le pays entretenait avec Moscou il y a encore quelques années. Pourtant, au-delà d’une dictature politique bien réelle et de son décorum, le communisme ne semble pas avoir beaucoup d’incidence ni sur le mode de vie des vietnamiens, ni sur leur sens des affaires… Partons donc de ce paradoxe entre politique communiste et économie capitaliste pour envisager la question du travail au Viet Nam, à partir des informations que nous avons récoltées jusqu’ici (humble mélange de recherches et d’impressions, de données et d’échos) !  

Pour mieux comprendre le contexte dans lequel nous évoluons, voici quelques repères historiques : en 1945, Hô Chi Minh, figure de proue de la Ligue pour l’indépendance du Viet Nam, proclame la République Démocratique du Viet Nam et dirige l’état communiste dans la lutte contre les colons français, puis contre les Etats-Unis, jusqu’à sa mort en 1969. Cependant la réunification du Viet Nam, entre le nord dirigé par les communistes et le sud toujours sous l’influence des Etats-Unis, doit attendre 1976.  Dix ans après la réunification, face à une situation économique catastrophique, le Parti Communiste au pouvoir doit faire des concessions : le Doi Moirenouveau ») réforme l’économie en la libéralisant (privatisations, ouverture aux marchés internationaux). Le retour à la croissance est donc un succès au goût amer : la dictature communiste doit s’accommoder d’une économie ouvertement capitaliste pour sortir le pays de la crise… 

Quelles sont donc les conséquences de ce paradoxe sur les modes de travail au Viet Nam ? Le code du travail vietnamien est imprégné de nombreux principes du communisme : protection des travailleurs, licenciements rendus difficiles, régulation du temps de travail et de la rémunération… Le cadre fixé par le droit est donc un héritage favorable du communisme. 

Avec l’ouverture à l'international, de nombreuses entreprises internationales se sont implantées et ont imposé leur fonctionnement, sans forcément l’adapter au contexte local. Cette situation a parfois été mal vécue : depuis 2008, de nombreuses manifestations ont été menées par des ouvriers vietnamiens dénonçant leurs mauvaises conditions de travail sous l’autorité de patrons étrangers intéressés par cette main-d’œuvre nombreuse et peu coûteuse. De façon générale, les relations de travail au Viet Nam semblent marquées par une conception très stricte de la hiérarchie : le patron a une autorité indiscutable et l’initiative peu encouragée. Cependant les ouvriers sont conscients de leurs droits et peuvent se faire entendre dans des situations abusives. 

Aujourd’hui, du fait de la croissance spectaculaire maintenue de l’économie vietnamienne, les investisseurs et entrepreneurs étrangers sont toujours plus nombreux et importent de nouveaux modèles de management : vaste sujet dont nous aurons l’occasion de reparler.

Au quotidien, dans les villes que nous avons traversées, il nous a semblé que le travail était avant tout un moyen d’enrichissement personnel : tout se vend et tout se négocie ! Les horaires peuvent être très amples en ce qui concerne tous les commerces de rue, mais le travail est complètement imbriqué à la vie personnelle : la famille est souvent présente sur le lieu de travail, on discute, on mange… et on fait une « pause » pour servir un client ! Cela a quelque chose de très étonnant lorsqu’on vient d’une société où l’équilibre entre travail et vie personnelle est souvent en tension. Pour une bonne partie de la population, le travail est à la fois une nécessité purement matérielle et une façon de vivre en communauté (famille, amis, voisins), avec une distinction presque inexistante entre otium et negotium

Pour conclure –du moins momentanément: nous avons pu observer que le travail au Viet Nam prend des formes extrêmement variées et se partage entre modèle traditionnel (agricole, rural), modèle ouvrier (avec influence croisée entre communisme et libéralisme) et modèle moderne de l'employé en col blanc, qui est promis à l’expansion puisque la tendance est à l’augmentation constante de la classe moyenne… Le sujet est donc extrêmement riche et nous tâcherons de vous en dire plus à l’occasion d’un prochain article ! 

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